La grande noctule, une espèce rare qui vit au creux des arbres

Au cœur des forêts, certains vieux arbres font office de maternité et abritent des communautés de grandes noctules. Pour en savoir plus sur cette espèce rare et menacée de chauve-souris, nous avons questionné un expert passionné, Thomas Déana, chiroptérologue de la LPO AuRA.

La grande noctule, cette quasi-inconnue

Découverte récemment en France, grâce à l’amélioration des techniques d’observation, la grande noctule est la plus grande chauve-souris d’Europe. Ce chiroptère peut mesurer jusqu’à 17 cm pour 46 cm d’envergure et peser entre 33 et 70 g. Reconnaissable à son pelage roux, ses oreilles rondes et ses grandes ailes fines qui lui permettent de parcourir de très grandes distances à haute altitude, la grande noctule est aussi une des rares chauves-souris dont le cri est audible par l’homme.

Principalement recensée en Europe du Sud, elle est présente, en France, dans les massifs de moyennes montagnes. Parce qu’elle vole de nuit à très haute altitude, le mode de vie de la grande noctule demeure mystérieux. « On sait qu’elle est insectivore et de manière ponctuelle carnivore parce qu’on a retrouvé des restes de petits passereaux dans ses déjections, mais personne n’a encore réussi à la voir en action », précise Thomas Déana. La grande noctule est capable de saisir ses proies et les digérer sans s’arrêter de voler. « Ce serait un rêve de capturer ce moment. »

©Yohan Peyrard

L’arbre creux abrite une communauté

Contrairement aux autres espèces de chiroptères, la grande noctule vit dans le creux d’un arbre, au cœur d’une forêt mixte de préférence, et toujours en communauté avec d’autres femelles en période de reproduction. Les mâles ne font pas partie de l’équation jusqu’à ce que les petits soient capables de voler. Quand elle est fécondée à l’automne, la femelle conserve le sperme du mâle jusqu’au printemps. Elle met bas en compagnie de ses congénères, une mise-bas pouvant rassembler jusqu’à 80 femelles. La forêt qui les abrite devient alors une véritable pouponnière !

La grande noctule est arboricole et nomade : tous les deux ou trois jours, les communautés changent d’habitat afin de mettre en sécurité leur petit et leur éviter les infections parasitaires. Voilà comment un arbre, même vieux, devient un cocon douillet pour une espèce en danger.

©Yohan Peyrard

Préserver les arbres à cavité pour préserver l’espèce

« L’arbre est un élément clé pour la survie de l’espèce » explique Thomas Déana. « Une forêt mixte pas trop haute en altitude avec beaucoup de hêtres ou de pins est intéressante pour la grande noctule. » Là réside l’enjeu d’une gestion sylvicole partagée : sauvegarder les forêts pour offrir un réservoir de biodiversité sur le long terme. Le deuxième défi réside dans les airs : le développement des parcs éoliens dans les zones d’habitat du chiroptère est une menace pour sa survie.

« Pour sauvegarder l’espèce, nous avons besoin de la connaître. C’est pour cette raison que nous menons des études et que nous organisons des événements pour partager nos connaissances avec le grand public », indique Thomas Déana. « Nous ne voulons pas opposer exploitants forestiers et défenseurs de la noctule. Nous souhaitons en revanche que cette étonnante chauve-souris et le sujet de sa préservation permettent d’ouvrir un dialogue ouvert et constructif. »

©Yohan Peyrard

Découvrez le projet de la LPO AuRa en faveur de la grande noctule